« Voici mon secret. Il est très simple : on ne voit bien qu'avec le cœur. L'essentiel est invisible pour les yeux.
— L'essentiel est invisible pour les yeux, répéta le petit prince, afin de se souvenir. »
Pour Antoine de Saint-Exupéry comme pour les peuples traditionnels, dans cet essentiel-là sont les sentiments. Et parmi eux se trouvent ceux qui attachent les êtres humains les uns aux autres.
Les villageois des peuples traditionnels vivent au sein de la nature, ils perçoivent par tous leurs sens les formidables mécanismes d'équilibre caractéristiques du monde vivant. Ces équilibres se manifestent dans les sentiments. En particulier, un manque d'harmonie dans les sentiments qui attachent aux autres est une maladie au sens africain du terme.
L'être humain construit d'immenses bâtiments mais son pouvoir sur les sentiments est faible. Les invisibles génies d'Afrique savent à l'inverse organiser la chance ou la malchance, nouer ou dénouer les liens entre les gens ; ils sont capables de changer les humeurs et même de provoquer des divorces ! Les sentiments sont leur principal domaine d'action. La médecine traditionnelle, inextricablement mêlée aux équilibres et aux déséquilibres, est alors du ressort des génies.
Au fond, une croyance en un génie ne serait-elle pas un outil agissant sur ce qui est « invisible pour les yeux » ? Sur le plan de la maîtrise des sentiments, les sociétés occidentales sont particulièrement incompétentes et les pratiques des guérisseurs traditionnels échappent le plus souvent à l'entendement d'un Occidental. Ces pratiques s'exercent pourtant bel et bien sur une réalité…