Indécence occidentale en Afrique

Le 05/11/2008, par Thomas

Dans les bateaux esclavagistes de la traite négrière pratiquée par les Occidentaux, l'espace par captif était d'un quart de mètre carré avec parfois seulement soixante-quinze centimètres de hauteur. Ils étaient marqués au fer, stockés nus, allongés sur le côté, avec les déjections et les vomissures. Durant ce passage en enfer qui durait de soixante à soixante-quinze jours, un esclave sur cinq mourrait. À l'arrivée, nettoyés et enduits d'huile de palme, ils étaient vendus sur des marchés. Puis ils travaillaient avec bien peu de droits sur eux-mêmes. Par exemple, lorsque une femme donnait naissance à un bébé, une pratique était de le confisquer pour le confier à une autre femme, ceci afin que les racines se perdent. La famille n'avait pas de statut légal. La plupart du temps il n'y avait pas de notion de salaire.

L'horreur rejoint celle de la Shoah sur un point au moins : elle est insoutenable. Et indéfendable.

Imaginons une scène : de jeunes Juifs parlent entre eux de la difficile histoire du siècle dernier. Survient un Allemand qui s'assoit non loin. Ce dernier, brusquement, prend conscience du sujet de la discussion. Quelle va être sa réaction ? Abondera-t-il dans le sens des Juifs ? Ou rappellera-t-il à l'inverse les cas de Juifs qui ont coopéré avec des nazis ? Défendra-t-il des aspects positifs du régime nazi ou énoncera-t-il des pratiques négatives de Juifs d'avant l'holocauste ? Non, bien sûr. Gêné et mal à l'aise, il tentera probablement de se faire oublier. Pourtant, lui-même est né après la guerre et n'a rien à se reprocher. Pourtant les jeunes Juifs n'ont pas non plus souffert eux-mêmes des déportations. Alors pourquoi cette gêne ?

La réponse, c'est la décence. Un Allemand n'est pas qualifié pour débattre de la Shoa avec des Juifs. Et ceci pour l'unique raison qu'il est allemand, de surcroît blanc, blond et grand. Sa nationalité et son apparence lui font porter une histoire. Et cette histoire a dépassé les frontières de la décence.

Le discours écrit par Henri Guaino et prononcé par Nicolas Sarkozy à Dakar le 26 juillet 2007 était-il historiquement juste ? Scientifiquement honnête ? Il était en tout cas indécent. L'histoire que l'on porte devrait nous gêner, elle devrait nous empêcher d'aller en Afrique pour pontifier sur le passé. La colonisation serait-elle moins injustifiable que la traite ? Allons, il faut se taire, et se tourner vers l'avenir.


Notes

Sur la traite européenne : Fauque C., Thiel M.-J. [2004], Les routes de l'esclavage, Paris, Hermé.